Soliloque d'un jeune Béninois


Lever de soleil dans un quartier de Parakou

Voici un nouveau jour, la Terre a tourné comme elle n’arrête pas de tourner, et tente dans son mouvement de tourner le côté de sa surface où se trouve ma région au soleil. Mais on en est loin pour le moment. On ne perçoit ce grand astre, paraît-il jaune, que de très loin dans l’horizon à l’Est. Et à propos de cette grosse boule de lumière, il y a trop de spéculations. Les gens disent qu’elle est blanche, en classe le Professeur de Science Physique dit qu’elle est jaune, admettant que sa lumière sur Terre est blanche et de sa décomposition s’obtiennent les autres couleurs. Plus loin de nous sur Mars, une certaine machine du nom de Curiosity la voit en bleu. Ou peut-être que le Soleil lui-même change délibérément de couleur pour se rendre mystérieux, puisque des fois au lever et au coucher il est rouge. Une boule jaune émettant une lumière blanche, qui change de couleur sur une autre planète et parfois le matin et le soir, bah ! y a que sur Terre que cela peut se concevoir. Bon, il faut dire que j’ai été trop prétentieux en disant que c’est seulement sur Terre que cela pouvait se passer hein ! Sinon, ai-je jamais été dans ces lieux qui se tendent à l’infini à des milliards d’années-lumière de nous ? En ai-je une idée ? Vaut mieux que je me taise ; autrement, je serais comme ceux qui ne voient pas plus loin que le petit bout de leur nez. Et d’ailleurs pourquoi songer à tout ça ? Pourquoi avoir vu le Soleil de l’œil d’un Humain, de celui d’un robot, de celui de la science et de celui d’un Martien alors que si l’on voit le Soleil dans cette position, on parle de l’aurore ou l’aube ? Sûrement parce qu’on est sur Terre. De toute façon je m’en fous. Mais j’aime ce moment de la journée. Oui je l’aime bien et pour deux raisons.

La première raison est qu'il me rappelle des propos qu’à défaut de vivre je ne me lasse de citer : « La nuit s’est dissipée, que l’aube nouvelle rayonne ! Au travail les amis, nous avons vaincu la fatalité. » Ces mots de l’éminent Universitaire me font rêver et si je devrais lui demander quelque ce soit un jour, loin du « Pourquoi trouviez-vous que telle personne était l’homme du ‘’dé-ve-lop-pe-ment’’ et que telle autre non ? » que lui demanderaient la plupart des gens, je me placerais devant lui tout minuscule comme Kirikou et je dirais, « M. Albert Tévoédjrè, d’où aviez-vous tiré cette inspiration en 1990 ? ». Mais pour le moment, je ne peux que rêver de se jour où la nuit se dissipera et je pourrai me dire alors à moi et à mes copains, « nous avons vaincu la fatalité. ». 

La deuxième raison qui fait que j’aime ce moment, c’est le fait qu’on l’appelle l’ « Aurore ». C’est le nom de cette fille qui a volé le cœur de mon ami. Quand je les vois ces deux-là, je souris et je me demande : qu’est-ce que c’est que ce sentiment que les gens appellent Amour et que ces deux tourtereaux ressentent l’un pour l’autre ? En fait, j’aime cette relation non pas parce que je vis une pareille, ni que j’en ai envie ! Pas du tout, que les choses soient bien claires. D’ailleurs, je me ris de tout ça, l’essentiel, c’est que mes deux amis sont heureux, et c’est ce qui compte pour moi. Bien sûr que je vais me marier et avoir des enfants et peut-être même qu’un jour je tomberai aussi amoureux et découvrirai ce truc que je trouve pour le moment illusoire. Je trouve que ceux qui se disent amoureux ne sont que victimes d’une illusion aussi tenace soit-elle. Mais bon, je ne vais pas me mettre à faire de la philosophie ce beau matin-ci. Il est temps de prendre ma douche et direct ! la route du collège.

Voilà ! Enfin je reviens après mes divagations. C’est le moment d’affronter la réalité, oui, la réalité d’un élève en classe de terminale au collège. La terminale, c’est bien sûr la classe où on passe l’examen du baccalauréat, c’est la classe qui fait flipper ses élèves, c’est la classe qui sème la terreur dans le monde des élèves. Et ces pauvres élèves, semble-t-il, pensent pouvoir dire une fois qu’ils réussiront à leur examen « Je suis libre ! », alors que c’est le calvaire qui se cache derrière ce diplôme, du moins pour ceux qui ne sont pas bien placés, ceux qui « n’ont pas de mains » ceux qui ne sont pas nés avec une cuillère dorée dans la bouche. Et moi aussi avec mes copains faisons partie de ceux-là. C’est donc à en croire les gens, l’enfer qui nous attend là où nous pensons qu’il y a la belle vie. Mais moi je ne crois pas à ces conneries, j’ai toujours pensé que ceux-là qui se sentent victimes de leurs destins ne sont victimes que d’illusions, de représentations collectives qu’ils n’essaient jamais de prendre au second degré et auxquelles ils se conforment simplement comme l’esclave se plie aux ordres de son maître…

PS : Cet article est extrait d’un livre que j’ai entrepris d’écrire et que j’ai arrêté depuis un moment. J’ai donc décidé d’en partager quelques fragments avec ceux qui l’aimeraient bien et si possible le continuer plus tard ; pourquoi pas !

« La nuit s’est dissipée, que l’aube nouvelle rayonne ! Au travail les amis, nous avons vaincu la fatalité. » ; Secrétaire de la conférence des forces vives de la Nation en 1990, le Professeur Albert Tévoédjrè avait terminé son rapport par ces propos gravés dans la mémoire des Béninois.

« Pourquoi trouviez-vous que telle personne était l’homme du ‘’dé-ve-lop-pe-ment’’ et que telle autre non ? » ; en 2006 lors des présidentielles, Albert Tévoédjrè décrivait Boni Yayi comme l’homme du développement qu’il préférait à Adrien Houngbédji.

« N’ont pas de mains » ; au Bénin, cette expression s’emploie pour désigner ceux qui n’ont pas des connaissances dans l’administration dans un contexte de corruption, de clientélisme et de népotisme.

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