Qu’est-ce qu’un Klébé, ce mot très employé par les internautes béninois ?

Ces derniers temps sur la toile, il est difficile de ne pas voir mentionné le mot klébé si vous parcourez un forum béninois. Au Bénin, il est récurrent que suite à certaines circonstances, certains termes dominent pendant un temps les conversations, un peu comme les effets hashtag. Il s’agit souvent de néologismes, de francisations ou simplement d’emprunts comme par exemple : « béninoiserie », « adogocratie », « kpayo », etc. Même s’il est loin de rivaliser avec son voisin de la sous-région la Côte d’Ivoire dans le domaine, le Bénin possède son lot de termes qui constituent le Français béninois. Dans cet article, je vous propose de parler du terme klébé. 

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Les Klébés au port autonome de Cotonou

C’est au Professeur Arifari-Bako que nous devons la reconnaissance du mot dans la littérature savante. Entre temps maître de conférences au département de Sociologie et Anthropologie de l’Université d’Abomey-Calavi au Bénin et à l’Université de Cologne en Allemagne puis directeur scientifique du Laboratoire d’Etude et de Recherche sur la Dynamique Sociale et le Développement Local (LASDEL-Bénin), Nassirou Arifari-Bako a vécu de belles années dans le monde scientifique et universitaire avant de se lancer en politique il y a quelques années. En 2001, il publie un article intitulé : « La corruption au port de Cotonou : douaniers et intermédiaires ». Dans ce document où il expose comment la corruption est institutionnalisée par la douane béninoise et au port autonome de Cotonou, Arifari-Bako explique que les Klébés sont une catégorie d’acteurs professionnels de la corruption qui a émergée au port autonome de Cotonou. « En effet, pour rendre effective leur action sur le terrain, écrit-il, les douaniers ont souvent recours à des agents supplétifs (pisteurs, chauffeurs et indicateurs de la douane), appelés « aides-douaniers » par les douaniers eux-mêmes et « klébés » (arracheurs de billets) dans le jargon des fraudeurs au sud du Bénin ». Il précise qu’au nord, les Klébés sont appelés « karen duwan » (chien de douane en langue haoussa) à la frontière bénino-nigérienne (Malanville), terme par lequel ils sont également désignés au Niger.

Arifari-Bako rapporte que les Douaniers justifient la présence des Klébés par l’insuffisance de leurs effectifs pour faire face au flux important de dossiers à traiter. En chiffre, il réconforte l’argument des douaniers par le fait que de 130 en 1985, le nombre d’agents de douane au port est passé à 36 en 1995 pour rester stagnant jusqu’en 2000. En gros, le mot klébé est un terme péjoratif désignant une catégorie d’agents informels et corrompus qui se sont fait une place au port de Cotonou pour répondre à diverses exigences le plus souvent illégales.

Les Klébés selon les internautes

Mais le terme a fait son entrer dans le jargon politique béninois et surtout chez les internautes depuis un certain moment. Le mot demeure péjoratif, et quand il est employé par un internaute ou un politicien, c’est pour désigner quelqu’un qui est, ou qu’il pense être un fou du roi, une sorte de larbin sous la botte d’un politicien ou d’une classe politique qui le paie. Pour les internautes béninois, les Klébés sont des individus dépourvus de raison et sans honneur qui sont prêts à tout pour prendre soin sur la toile de l’image et des intérêts de ceux qui les paient.